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Baguettes fraîches et chaleur humaine grâce à Martine

La distribution de pain à domicile est indispensable pour les habitants de la campagne, parfois âgés et fragiles. Rencontre avec Martine, employée à la boulangerie du château à Chef-Boutonne, qui vend le pain lors de ses tournées.

Claudette est ravie d’être servie à domicile par Martine (à gauche). « Cela m’évite d’aller à Chef-Boutonne juste pour une baguette », dit-elle.
Claudette est ravie d’être servie à domicile par Martine (à gauche). « Cela m’évite d’aller à Chef-Boutonne juste pour une baguette », dit-elle.
© N.C.

Martine descend de son utilitaire les bras chargés de plusieurs pains. Elle passe par la porte-fenêtre entrouverte et ressort aussitôt : « J’ai mis les pains sur la table comme convenu avec ma cliente, il lui en faut un bon nombre car c’est les moissons et il y aura du monde à table ce midi ». Plus loin, c’est César, le chien, qui l’accueille, la langue bien pendante rêvant à  des sucreries. « Parfois, il a droit aux gâteaux de la veille », souligne l’employée de la boulangerie du château à Chef-Boutonne, appartenant au couple Vacher. Sillonnant la campagne à grands coups de klaxon, Martine connaît bien ses clientes et ses  clients, même les goûts de leur chien qui n’aboient même plus sur son passage. Et d’ajouter : « Depuis six ans (Ndlr, elle travaille depuis treize ans à la boulangerie), je fais la tournée quatre fois par semaine soit deux fois deux itinéraires différents, environ 400 kilomètres par semaine. Je connais les rues par cœur alors les gens et leurs habitudes, n’en parlons pas! En plus je suis originaire du coin, certains d’entre eux m’ont connue gamine. » Aujourd’hui, la gamine devenue quadragénaire fait partie de leur quotidien. Si certains accrochent à leur portail une pancarte avec le mot PAIN à la craie, d’autres ont sorti leur sac à pain ou fabriqué une espèce d’abri familier à Martine. Puis, il y a - et c’est la majorité - les clients ou clientes qui attendent Martine. Car si la campagne chef-boutonnaise est charmante avec ses pierres sèches lézardées par les roses trémières, elle compte de nombreuses personnes isolées. « Heureusement à cette saison, elles sont occupées à jardiner ou à bricoler. On ressent moins le poids de la solitude qu’en hiver », constate-t-elle. Avant de poursuivre, par un souvenir émotionnellement  lourd : « Un jour, une dame âgée m’a dit que j’étais la première personne qu’elle voyait depuis cinquante-cinq jours. Cela fait de la peine. Ce métier, ce n’est donc pas que de la vente, c’est aussi du social ». Du lien social, peut-elle même dire car, Martine en créé chaque jour lors de ses tournées même si ce n’est que pendant cinq minutes. Sans compter le service rendu à ces personnes souvent âgées appartenant à une génération ou un repas sans pain est une hérésie. Outre les phrases du type « De la ficelle bien belle pour la petite fille! » ou « Il fait meilleur qu’hier », des conversations plus profondes naissent. « Chez certains, mon café est déjà servi, je ne regarde pas l’heure. On discute, je leur rends des petits services. En exerçant ce métier, on est obligé de cultiver la proximité, on ne peut pas rester indifférent. Certes, ce ne sont pas des amis mais bien plus que de simples clients ou clientes », détaille Martine, remerciée  bien souvent pour ses attentions par des fruits et légumes du jardin ou des chocolats à Noël.

Campagne abandonnée
Au volant de son utilitaire en bout de course, Martine explique que les services de proximité se meurent. Constat alarmant partagé par Marguerite et Bernard. « Pour moi qui ne conduis pas, ce service est essentiel », dit la première. Et Bernard, fringant retraité, de poursuivre : « J’ai une résidence secondaire ici et je m’aperçois qu’on est ravitaillé par les corbeaux. En plus, il y a de moins en moins de corbeaux, c’est triste de voir comme on laisse tomber la campagne! » Marguerite et Bernard poursuivent ensuite sur  le manque de médecins. Et de leur propos perce l’inquiétude. Plus loin, c’est Gérard qui déplore la disparition des services de proximité. « J’avais une boucherie ambulante, quand je suis parti à la retraite, personne n’a pris la suite », regrette-t-il. Avant de conclure  avec vigueur à l’adresse de Martine : «Il ne faut pas perdre espoir!»


En chiffres
Selon la Fédération départementale de la Boulangerie-pâtisserie des Deux-Sèvres, dans l’Hexagone, on dénombre 33 000 boulangers-pâtissiers et chaque jour, 15 millions de clients poussent la porte des 37 000 points de vente. Les boulangers-pâtissiers réalisent un chiffre d’affaires annuel de 10 milliards d’euros TTC et emploient 160 000 personnes salariées et non-salariées. En Deux-Sèvres, on compte 220 artisans boulangers-pâtissiers. Le chiffre d’affaires annuel est de l’ordre de 50 millions d’euros. La boulangerie-pâtisserie deux-sévrienne panifie 26 500 tonnes de farine et représente du marché « pain ».

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