Aller au contenu principal

« L'écologie ne doit pas se faire au détriment de l'homme »

Paroles de jeune, Technologie, PUY-DE-DÔME (63) Laure et Alexandre Prévault-Osmani ont changé de vie pour construire des tracteurs 100% électriques et donner un nouveau visage à l'agriculture. Leur entreprise Sabi Agri est en pleine expansion.

Alexandre Prévault-Osmani sur son tracteur électrique Alpo à l’occasion d’une démonstration en plein champ.
Alexandre Prévault-Osmani sur son tracteur électrique Alpo à l’occasion d’une démonstration en plein champ.
© M. COMTE

Ces deux jeunes puydômois pourraient bien d'ici quelques années révolutionner le parc mécanique agricole français. À tout juste 30 ans, Laure et Alexandre Prévault-Osmani sont les heureux concepteurs d'un tracteur électrique made in Puy-de-Dôme. Après avoir abandonné leurs professions respectives, ils se consacrent au développement de leur jeune entreprise Sabi Agri.

 

UNE PETITE ÉTINCELLE...

Alexandre est l'initiateur de ce projet. Fils d'agriculteurs et destiné à reprendre l'exploitation familiale à Aubiat, il choisit malgré tout de s'orienter vers une formation à l'IFMA (Institut français de mécanique avancée) de Clermont-Ferrand. « J'ai toujours eu une passion pour la mécanique et la conception des machines ». Au terme de ses études, il ne rejoint pas encore la ferme mais emprunte le chemin des voyages. Curieux de nature, Alexandre entreprend un véritable tour de l'Europe via le Woofing (réseau de fermes en agriculture biologique offrant le gîte et le couvert à des travailleurs bénévoles étrangers). De retour sur ses terres natales puydômoises, il s'installe en Gaec avec ses parents. C'est en développant une activité de maraîchage biologique et un élevage de porcs plein air que germe l'idée. « L'agriculture est en pleine évolution, avec des enjeux tant sociétaux qu'écologiques et économiques. Je me demandais alors comment mieux cultiver tout en respectant la terre et les hommes. Mon souhait est de participer pleinement à trouver des solutions pour atteindre ce compromis ». Le tracteur électrique s'impose alors à Alexandre comme l'une des solutions. Le cerveau en ébullition et toutes ses connaissances mises à contribution, il ne tarde pas à construire son premier prototype en 2016. Le résultat est au-delà de ses espérances puisqu'il parvient à relever plusieurs défis technologiques jusque-là insurmontables pour les constructeurs. « Leur problème, c'est qu'ils se posent la question suivante : un tracteur électrique peut-il compenser un tracteur thermique ? Bien sûr que non ! Pour autant, est-ce vraiment ce que recherchent les agriculteurs ? Et si nous faisions en sorte que les agriculteurs adaptent leurs pratiques en fonction du tracteur électrique ? Après tout, pourquoi une innovation n'en créerait-elle pas une autre » ?

 

À DEUX C'EST TOUJOURS MIEUX

Armé de ses connaissances en mécanique et robotisation, Alexandre construit son premier tracteur électrique destiné au maraîchage. Il l'utilise dans un premier temps sur sa propre ferme. Certain de tenir là « une innovation majeure » et pris dans la fièvre de l'invention, il abandonne l'exploitation agricole familiale pour se consacrer pleinement à son nouveau métier d'ingénierie agricole. Avec lui, il entraîne son épouse Laure Prévault-Osmani, alors avocate en droit environnemental, pénal et droit des étrangers à Clermont-Ferrand. « Alexandre a toujours partagé avec moi ses réflexions et ses recherches. Nous avons démarré ensemble, sans trop savoir où nous allions mais il nous paraissait tellement évident d'emprunter ce chemin. J'adorais mon métier. Je faisais des plaidoiries pour sauver les hommes. Aujourd'hui, j'ai encore ce sentiment mais en faisant quelque chose de complètement différent ».

Avec un prototype finalisé, de nombreuses idées et plusieurs brevets déposés, Laure et Alexandre bâtissent leur entreprise Sabi Agri en 2017. Avant même la première commercialisation de leur tracteur, ils reçoivent le 1er prix de l'innovation au Salon Tech&Bio.


OSEZ LE TRACTEUR ÉLECTRIQUE

À le voir, ce fameux tracteur n'a rien d'un tracteur classique. Son architecture est unique, entièrement « épurée », dépourvue de cabine et même de volant. Étonnant en tout point, il n'est cependant pas dépourvu de sens. « Il a été considérablement allégé puisque le tracteur Alpo Basic pèse environ 550 kg et 800 kg pour la version 4x4. L'absence de cabine se justifie tout bêtement parce qu'en maraîchage ou viticulture, on réalise très rarement des travaux sous la pluie. Le volant a été remplacé par une manette de pilotage (style joystick) pour une conduite plus intuitive et confortable. Tous ces éléments replacent l'homme au centre de son travail en garantissant son confort ».

Entièrement silencieux, le tracteur de Laure et d'Alexandre ne dégage aucun gaz et du fait de son faible poids, respecte le sol. D'une puissance de 25 CV électrique (équivalent à 40 CV thermique) et équipé d'un relevage avant (250 kg) et arrière (450 kg), il peut travailler durant 8 heures après seulement 1h30 de recharge. Déjà sept exemplaires de ce tracteur nouvelle génération ont été vendus dans toute la France. Au-delà de la machine en elle-même, les deux jeunes offrent à leurs clients « l'opportunité de bâtir l'agriculture de demain centrée sur les nouvelles technologies, l'efficience électrique et le respect du sol », explique Laure.

 

IDÉES EN PAGAILLE

Alexandre tient à démultiplier son idée à d'autres outils comme le valet de ferme utilisé dans les élevages. « Nous avons aussi en projet la robotisation de nos tracteurs. Nous sommes entièrement conscients qu'un tel engin ne remplacera jamais un tracteur thermique mais d'ici quelques années, plusieurs le pourront ».

Laure et Alexandre Prévault-Osmani s'attèlent pour l'instant à la construction de leur usine à Saint-Beauzire, près de Clermont-Ferrand. En juin, ils investiront un local de 360 m² où les tracteurs seront fabriqués. Une zone d'essai de plus de 3 000 m² permettra de tester les machines en conditions réelles. Sabi Agri devrait également compter non plus quatre salariés mais près d'une dizaine.


LE TRACTEUR ÉLECTRIQUE

- 8 heures d'autonomien

- 1h30 de recharge

- Puissance de 25 à 50 cv électrique

- Un poids compris entre 550 et 800 kg

- 2 ou 4 roues motricesn Relevage avant de 250 Kgn Relevage arrière de 450 Kg

- Adapté à tous les outils attelés de catégorie 1

Sous-titre
Vous êtes abonné(e)
Titre
IDENTIFIEZ-VOUS
Body
Connectez-vous à votre compte pour profiter de votre abonnement
Sous-titre
Vous n'êtes pas abonné(e)
Titre
Créez un compte
Body
Choisissez votre formule et créez votre compte pour accéder à tout Caracterres.

Les plus lus

À Clavé, en Gâtine, cédants et repreneurs sont réunis sur l'exploitation de polyculture-élevage.
De gauche à droite : Olivier et Thierry Parent, Daniel et Valentin Nivault et François Agneray.
À 50 ans, il cède son exploitation et installe deux jeunes

À Clavé, Olivier Parent, 50 ans, a fait le choix de cesser son activité d'agriculteur après le départ à la retraite de son…

Claire Charron, agent d'assurances dans le sud Deux-Sèvres, pose ici avec Tartine, sa génisse Parthenaise, récemment accueillie sur l'exploitation de ses voisins, et avec un chiot de la dernière portée de huskies de l'élevage canin familial.
Portrait de femme en agriculture : Claire, le conseil au service des agriculteurs

Originaire du Loiret, Claire Charron, piquée d'agriculture dès l'enfance, est devenue une figure incontournable du conseil…

Blocages des cinq principaux Leclerc des Deux-Sèvres pour réclamer de la transparence

Toute la journée du 23 février, les tracteurs de la Fnsea 79 et de JA 79 ont bloqué les accès aux parkings des magasins…

À 22 ans, Charlotte Boyé veut prendre le temps de gagner en expérience, avant une éventuelle installation.
Charlotte et les vaches

Charlotte Boyé est salariée sur deux élevages sélectionneurs allaitants de Gâtine. L'emploi idéal pour cette mordue des vaches…

Installé depuis 2016 sur le Gaec familial à Saint-Georges-de-Noisné, Loïc Hubert présentera pour la première fois un animal au salon. Il s'agit de Pivoine, 4 ans et Label Rouge.
Loïc et Pivoine : en route vers le salon de l'agriculture !

Les éleveurs sont dans les starting-blocks pour présenter le meilleur de la race à la Capitale. Pour Loïc Hubert, de Saint-…

Laetitia Desclaux est installée à Orches.
" Plus qu'un travail, une véritable passion "
Laëtitia Desclaux est installée depuis mai 2023 à Orches. Elle partage son expérience de jeune installée. Entrée dans le monde du…
Publicité