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Désabusés, les agriculteurs se préparent à une rentrée musclée

Ils étaient près de 100, adhérents de la Fnsea et de JA, à se déplacer à Sainte-Soline mardi 11 août pour rencontrer Xavier Beulin.

Les sujets de mécontentement sont nombreux. Les agriculteurs veulent des actes.
Les sujets de mécontentement sont nombreux. Les agriculteurs veulent des actes.
© C. P.

La veille la Cooperl boudait le marché du porc breton évoquant « son incapacité à maintenir le prix exigé par l’Etat français soit 1,40 €/kilo » alors que sur son activité export - 35 % de ses volumes – la coopérative se trouve en concurrence avec des pays dont les cours sont inférieurs de 0,28 à 0,38 €/kilo. La semaine précédente certains industriels laitiers déclaraient ne pas avoir pris d’engagement quant au niveau de prix pour la fin de l’année contrairement aux annonces. Mardi 11 août, c’est donc dans un climat de tension et d’exaspération palpable que Xavier Beulin, président de la Fnsea, était accueilli par les siens à Sainte-Soline. Sur l’exploitation de Sylvie et Philippe Perrault, éleveurs de chèvres, les échanges, parfois passionnés, portaient sur le prix mais pas seulement. La valorisation des productions agricoles découlera de stratégies claires tant à l’échelle française qu’européenne. C’est précisément cette absence de stratégie, de politique claire que les agriculteurs à travers les nombreux sujets évoqués ont fustigé toute la matinée. Ils dénoncent avec véhémence l’absence de perspectives économiques, des prix qui ne permettent plus de couvrir les charges, les stratégies opaques des coopératives ou industriels, les lourdeurs administratives, le dumping social et environnemental qui à l’échelle européenne défavoriserait l’agriculture française. « Un mouvement profond s’est engagé au printemps. L’agriculture touche le fond. Nous sommes en train de mettre le coup de pied qui va nous faire remonter », espère Xavier Beulin. Et de poursuivre : « Nos élus doivent arrêter de nous promettre monts et merveilles, la main sur le cœur. Il est urgent d’agir. Urgent de définir un cadre politique ouvrant sur la mise en place d’outils efficaces. Nous, agriculteurs, ne voulons pas moins d’Europe, mais mieux d’Europe. Il faut œuvrer pour que tous les pays européens soient au diapason ». Le leader syndical a profité de l’évocation de ce sujet pour mobiliser les adhérents. Une manifestation est programmée le 7 septembre à Bruxelles, jour du conseil des ministres. Un rassemblement visant à défendre la naissance d’une Europe politique permettant d’harmoniser les règles. Une nécessité économique pour la France, où l’agriculture fait les frais d’un dumping social et environnemental qui l’étoufferait. « Comment nos abattoirs peuvent-ils être compétitifs face à des outils allemands qui emploient 80% de main-d’œuvre polonaise ? », interpellait Céline Sergent, éleveuse de porcs à Antran dans la Vienne. Adhérente de la Cooperl, la jeune exploitante tout en défendant des prix et de la stabilité, exprimait une certaine compréhension de l’action menée par sa coopérative en début de semaine. « Il y a face à nous agriculteurs, mais aussi face à nos outils, un mur. On le voit. Mais on continue d’avancer faute d’alternative. Ma crainte, c’est que nos élus politiques ne voient pas plus que nous les solutions pour faire exploser ce mur avant qu’on ne se le prenne. »


Occuper le terrain national
Outre cette mobilisation sur le front européen, Xavier Beulin défendait le maintien de la veille exercée depuis quelques semaines sur le comportement de l’industrie agro-alimentaire et de la distribution française. « Nos coopératives ne peuvent pas tout, certes. Nous sommes souvent exigeants à leur égard. On leur demande de collecter partout mais aussi de faire le meilleur prix. Ce n’est pas toujours cohérent. Toutefois, les industriels doivent savoir que nous sommes vigilants. Et que ceux, dans leurs rangs comme dans ceux des distributeurs, qui ne joueront pas le jeu, nous reverrons. En amont de l’action à Bruxelles, nous occuperons le terrain national. » Car, à l’harmonisation européenne doivent s’ajouter de réelles avancées sur la répartition des marges. Et Xavier Beulin d’évoquer : « Les producteurs français investissent trois fois plus que les transformateurs et les distributeurs pour ne percevoir que 8 euros sur un panier d’une valeur de 100 euros. Nous devons nous battre pour que la répartition de la valeur ajoutée soit plus équilibrée ». Se battre c’est ce à quoi les exploitants, une centaine installée sous le hangar de stockage de paille de L’Earl de La Bouchetterie, se préparent. S’ils se sentent économiquement fragiles, ils se sentent également les proies d’une administration toujours plus exigeante sans pour autant pouvoir garantir ses décisions. A l’image de cet éleveur de porcs de Vendée engagé depuis sept ans dans un projet dont les permis de construire et l’autorisation d’exploiter, validés par les services de l’Etat, ont fait l’objet de procédures successives retardant à chaque fois la réalisation du projet. « J’avais 43 ans, tout était possible. J’en ai 51 aujourd’hui, interpelle-t-il.  Si l’on veut garder une économie sur nos territoires, il faut via les outils législatifs donner une vraie valeur aux décisions administratives. » Le dépôt d’une caution en rapport avec le montant de l’investissement contre lequel un recours est déposé est une chose, juge cet éleveur en réaction à la proposition de Xavier Beulin. « Ce n’est pas suffisant. Nos politiques s’affichent à nos côtés pour aller ensuite verser des subventions à ces associations qui par principe s’opposent. » La défiance qui affecte le monde agricole s’exprimait la semaine dernière en Deux-Sèvres en présence de Xavier Beulin. « Vous connaissez tous l’importance de l’événement qui s’annonce pour la fin de l’année à Paris. Pour que la COP 21 ne se passe pas dans un grand bazar, il faudra bien plus que des paroles. Nos élus sont contraints de passer aux actes », certifiait le leader syndical.

Le tour des dossiers

- Lait ou viande, coopératives ou négociants, c’est par la contractualisation que des solutions arriveront. « L’engagement dans une coop est une chose. Négocier un contrat en est une autre », affirmait Xavier Beulin. Les contrats à venir doivent être clairs et stables afin que l’exploitant puisse définir en connaissance, sa stratégie. - A la présentation du contrat de territoire visant, par une gestion responsable des volumes d’eau, à développer le stockage, Xavier Beulin s’est dit plein d’espoir. « Les exploitants sont responsables et pleins de bon sens. » - La taxe d’équarrissage dont les nouvelles règles d’application amènent les éleveurs de chèvres « à consacrer 10% de leur chiffre d’affaires », évaluait Samuel Herault, à l’expédition des bêtes mortes, exaspère en Deux-Sèvres. « Faut-il revoir l’assiette ? », note Xavier Beulin.  « Il faudra avec la Fnec rouvrir le dossier. » - Un travail sur la traçabilité des produits doit être mené pour offrir aux consommateurs les éléments nécessaires pour juger. - Parmi les points à faire évoluer rapidement Xavier Beulin place la compétitivité des entreprises. « Ca passera par des réformes sur la fiscalité, une réglementation moins exigeante ou au moins stable. » Il faut également trouver les moyens de restructurer la dette des exploitations aujourd’hui asphyxiées. « Plus que des reports, ne peut-il pas naître des solutions de rachat de cette dette par des partenaires. A travailler », pose le président de la Fnsea.

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